Edition provisoire
Le rôle des parlements dans la consolidation et le
développement des droits sociaux en Europe
Résolution 1824 (2011)1
1.
L’Assemblée parlementaire déplore les récentes décisions
prises dans certains pays européens de procéder à des coupes
drastiques dans les programmes de protection sociale censés
garantir l’accès aux droits sociaux. Elle note, par ailleurs,
les conséquences désastreuses que peuvent avoir de telles
décisions, s’agissant notamment des catégories les plus
pauvres et défavorisées de la population.
2.
L’Assemblée estime que les parlements ont un rôle essentiel à
jouer dans la consolidation et le développement des droits
sociaux en Europe pour contrer ces tendances. Rappelant les
principes d’indivisibilité et d’interdépendance des droits
humains (y compris des droits sociaux), l’Assemblée appelle
les parlements des Etats membres à prendre en compte les
normes internationales en matière de droits sociaux dans
l’exercice de leurs principales fonctions, en l’occurrence
législative, de représentation et de contrôle.
3.
L’Assemblée souligne, en particulier, l’importance de garantir
le droit à la santé et notamment le droit à un environnement
sain, propre et sûr, en tant qu’un des droits sociaux
fondamentaux directement lié au droit à la vie.
4.
L’Assemblée invite en conséquence les parlements des Etats
membres:
4.1. à
prendre des mesures afin de mettre en œuvre les
recommandations énoncées dans la Résolution
1792 (2011) de l’Assemblée sur le suivi des engagements
concernant les droits sociaux, et en particulier de
continuer de promouvoir, aux niveaux européen et national,
la signature, la ratification et la mise en œuvre du
Protocole de 1991 portant amendement à la Charte sociale
européenne (STE n° 142, «Protocole de Turin»), du Protocole
additionnel de 1995 (STE n° 158) prévoyant un système de
réclamations collectives, et de la Charte sociale européenne
révisée de 1996 (STE n° 163);
4.2.
à inclure, dans le cadre des débats parlementaires consacrés
aux droits de l’homme, un examen régulier de la mise en œuvre
des droits sociaux, en veillant en particulier à ce que les
gouvernements prennent les mesures appropriées pour donner
suite aux décisions prises par le Comité européen des Droits
sociaux concernant l’application des articles de la Charte
sociale européenne révisée;
4.3.
à examiner soigneusement et sur une base régulière les
politiques gouvernementales mettant en œuvre le droit à la
santé et à se tenir au courant des derniers développements
afin de veiller à ce que les progrès scientifiques respectent
pleinement les droits humains et la dignité de l’être
humain;
4.4.
à prendre en considération la perspective des droits humains
en tant que critère principal lors de l’exercice du contrôle
parlementaire des politiques publiques et de l’établissement
des budgets, notamment dans le domaine social et de la santé;
4.5.
à garantir un contrôle parlementaire de la mise en œuvre des
accords, programmes et budgets internationaux susceptibles
d’avoir un impact sur les droits sociaux, conformément à la Résolution
1289 (2002) et la Recommandation
1567 (2002) de l’Assemblée sur le contrôle parlementaire
des institutions internationales;
4.6.
à sensibiliser les parlementaires et les membres des services
de recherche parlementaire sur les droits sociaux, notamment
au moyen de la dispense d’une formation spécialisée et de
cours d’introduction générale destinés aux parlementaires
nouvellement élus;
4.7.
à créer un groupe sur le développement des droits de l’homme
auquel participe l’ensemble des partis politiques, afin
d’associer les parlementaires et les services de recherche
parlementaire aux débats sur le développement des droits de
l’homme de troisième génération relatifs à un environnement
sain, propre et sûr;4
4.8.
à renforcer la coopération interparlementaire et améliorer
l’échange de bonnes pratiques au niveau international,
notamment:
4.8.1.
en améliorant la
coordination et la coopération entre les membres des
délégations parlementaires nationales dont les actions peuvent
avoir un impact sur la consolidation et le développement des
droits sociaux aux niveaux national et européen, y compris les
membres des commissions des droits de l’homme et des
commissions des affaires européennes au niveau national;
4.8.2.
en élargissant la coordination et l’échange d’information sur
la mise en œuvre des droits sociaux entre les parlementaires
des mêmes pays dans les forums internationaux, y compris,
l’Assemblée parlementaire, le Parlement européen, le Conseil
nordique, la Conférence des Organes Spécialisés dans les
Affaires Communautaires et Européennes des Parlements de
l'Union européenne (COSAC), l’Union interparlementaire (UIP)
et le Réseau parlementaire sur la Banque
mondiale (RPsBM);
4.8.3.
en prenant une part active à la Conférence du Conseil de
l’Europe sur l’environnement, le changement climatique et les
droits de l’homme qui se tiendra à Strasbourg en octobre 2012,
afin d’examiner la question du développement des droits de
l’homme de troisième génération relatif à un environnement
sain, propre et sûr et d’échanger les bonnes pratiques aux
niveaux local, régional et national;
4.8.4.
en participant activement aux campagnes internationales de
promotion des droits de l’homme, y compris, entre autres, au
Réseau des parlementaires de référence de l’Assemblée
parlementaire engagés dans la lutte contre la violence à
l'égard des femmes et au Réseau des parlementaires de
référence mis en place pour la campagne du Conseil de l'Europe
«Un sur cinq» contre la violence sexuelle à l’égard des
enfants;
4.8.5.
en développant la coopération avec la Conférence des Organes
Spécialisés dans les Affaires Communautaires et Européennes
des Parlements de l'Union européenne (COSAC) pour un échange
de bonnes pratiques en matière de contrôle parlementaire des
programmes gouvernementaux.
5.
L’Assemblée est d’avis que les Etats membres doivent également
agir d’urgence afin de garantir un accès effectif aux droits
sociaux, conformément aux normes, obligations et engagements
internationaux, et les invite en conséquence:
5.1. à
prendre les mesures nécessaires pour garantir la réalisation
des engagements eu égard aux droits sociaux inscrits dans
les conventions du Conseil de l’Europe et des Nations Unies;
5.2. à
appliquer les principes d’égalité et de non discrimination
comme levier pour la mise en œuvre des droits sociaux;
5.3. à
faire un meilleur usage de l’Assemblée parlementaire pour
superviser le travail des organisations internationales dont
les décisions ont un impact sur la mise en œuvre des droits
sociaux, en particulier celles qui ne disposent pas
d’instances parlementaires en interne, telles que
l’Organisation mondiale de la santé;
5.4. à
veiller à ce que les positions nationales exprimées au plan
international dans le domaine de l’économie, des finances et
du commerce respectent les engagements nationaux souscrits
au titre des traités internationaux des droits humains;
5.5. en
vue de consolider et de développer le droit à la santé, qui
reste une priorité, à prendre des mesures:
5.5.1.
pour introduire dans leur législation et pratique nationales
les principes et droits inscrits dans la Charte sociale
européenne révisée, en prêtant une attention particulière au
principe selon lequel toute personne a le droit de bénéficier
de toutes les mesures lui permettant de bénéficier du meilleur
état de santé possible;
5.5.2.
pour contribuer à l’élaboration, la signature et la mise en
œuvre d’un nouveau protocole à la Charte sociale européenne
révisée sur le droit à la santé, y compris le droit à un
environnement sain, propre et sûr;
5.5.3.
pour garantir l’application des traités internationaux sur le
droit à la santé à l’égard de groupes cibles spécifiques
(enfants, femmes, personnes handicapées, personnes âgées),
dans des contextes particuliers (santé au travail) et grâce à
l’amélioration des conditions permettant l’exercice du droit à
la santé (effets environnementaux sur la santé);
5.5.4.
pour mettre en œuvre les instruments conventionnels du Conseil
de l’Europe qui ont un impact sur le droit à la santé,
notamment la Convention pour la protection des droits de
l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des
applications de la biologie et de la médecine (Convention
d’Oviedo, STE n° 164), et ses Protocoles;
5.5.5.
conformément à la
Recommandation 1614 (2003) de l’Assemblée sur
l'environnement et les droits de l’homme, pour signer,
ratifier et mettre en œuvre la Convention des Nations Unies
sur l’accès à l’information, la participation du public au
processus décisionnel et l’accès à la justice en matière
d’environnement et son Protocole sur les registres des rejets
et transferts de polluants («Convention d’Aarhus»).
1 Discussion par l’Assemblée le
23 juin 2011 (25e séance) (voir Doc.
12632, rapport de la commission des questions sociales, de
la santé et de la famille, rapporteur: Mme Ohlsson,
et Doc.
12658, avis de la commission de l'environnement, de
l'agriculture et des questions territoriales, rapporteur: Sir
Alan Meale). Texte adopté par l’Assemblée le 23 juin
2011 (25e séance).
Voir également la
Recommandation 1976 (2011). |